Vous avez été nombreux à me demander, tant le soir de l’élection que par courriel ou autrement, de commenter le résultat de l’élection dans Verdun.
En quelques mots, le PQ (24,4%) y a subi la pire dégelée de son histoire alors que le PLQ (50,6%) y faisait simplement son 7e meilleur score, la CAQ (12,2%) ne réussissant pas à maintenir sa position de 2012 et QS (9,6%) doublant sa performance de 2007.
Libérale depuis sa création en 1965, Verdun l’est demeurée pour une 14e fois le 7 avril dernier.
La dégelée péquiste
Le PQ avait pourtant tout misé, cette fois-ci : une candidate fort connue, aimée du public, bien appuyée par une horde de comédiens et comédiennes, une première-ministre qui a multiplié les visites (6, si ce n’est pas 7, dont une le jour même de l’élection), l’appui de plusieurs ministres, bref, la totale. Rien nit fit. Madame Pintal a mené une campagne en tout point remarquable, voire exemplaire, pour laquelle elle doit être félicitée. À sa défense, on doit dire que dans les circonstances et malgré ce qu’en disait son équipe d’organisateurs locaux chevronnés pour la plupart, elle n’avait aucune chance de l’emporter dès lors que la campagne nationale a dérapé et que les stratèges péquistes se sont mis à improviser dans la panique.
Les candidats du monde de la télévision, du théâtre et du spectacle, ainsi que leurs organisateurs doivent se méfier : ce qu’ils voient aux portes, ce qu’ils entendent dans la rue est beaucoup plus le fruit de l’admiration que les gens portent à l’artiste qu’ils sont que de l’accord avec le message politique qu’ils véhiculent. Un autre exemple récent : on disait de Sébastien Dhavernas, au cours de la dernière campagne électorale municipale, qu’il était de tous les candidats de l’équipe Coderre celui qui avait le meilleur pointage aux portes. Pourtant, lui aussi a subi une défaite qu’il n’attendait pas. Difficile de pointer correctement quand on est reçu dans l’enthousiasme soir après soir, porte après porte.
Pour mémoire, disons que le meilleur résultat obtenu par le PQ dans Verdun le fut en 1981 alors que Fabiola Renaud fit 36% contre le dernier député-maire de l’histoire du Québec, l’unique Lucien Caron, qui y réussit la 3e meilleure performance du PLQ avec 61.4% du vote populaire.
La forteresse libérale retrouvée
Les vieux guerriers du PLQ, bien appuyés par une équipe de jeunes loups dynamiques n’ont pas fait mentir leur réputation et ont augmenté le vote libéral de 15%, puisant allègrement tant chez les électeurs péquistes que chez ceux qui étaient allés stationner du côté de la CAQ en 2012. Leur candidat-vedette, le très ministrable Jacques Daoust a fait tout ce qu’il fallait dans le peu de temps dont il disposait, expliquant dans un langage simple des choses compliquées, rendant claires des choses qui ne l’étaient pas toujours. Les appuis perdus en 2012 sont rentrés au bercail et le PLQ a retrouvé la forteresse qui est la sienne depuis 49 ans. Peu de chances de la perdre dans un avenir prévisible, en tout cas pas aux mains du PQ.
Si le PQ a connu 11 candidats en 13 élections générales de 1970 à 2014, le PLQ n’en a présenté que 5 en 14, de 1966 à 2014 : Claude Wagner en 1966, Lucien Caron de 1970 à 1981, Paul Gobeil en 1985, Henri-François Gautrin de 1989 à 2012 et enfin, Jacques Daoust cette année. Gautrin y a été élus 7 fois, Caron 5. Pour le PQ, Richard Langlais y a été battu 2 fois, en 2007 et 2008.
Le stationnement de la CAQ s’est vidé
Sans surprise, notamment si l’on tient compte de la faiblesse de son candidat inconnu des Verdunois, la CAQ n’a pu répéter son exploit de 2012 (18,9%) et s’est contenté d’un maigre 12,2%, bien en deçà des attentes de son chef et des résultats obtenus dans l’ensemble du Québec. Depuis sa création en 1994, les résultats électoraux de l’ADQ, ancêtre de la CAQ, n’avaient cessé de grimper : 7.0% en 1994, 11,3% en 2003, 17,6% en 2007, avant de retomber lourdement à 6.0% en 2008. Ceux qui avaient choisi de stationner au PQ ou mieux chez monsieur Legault en 2012 plutôt que voter PLQ, sont rentrés à la maison. Pas sûr, non plus, que la CAQ s’en remette facilement.
QS triple son vote!
L’air de rien, QS a augmenté son vote de 31% (9,6% en 2014 contre 7,3% en 2012). Il est vrai que les chiffres sont marginaux quand on est sous la barre des 10%. Mais quand même. Ce résultat est nettement supérieur (2%) au score obtenu par le parti à travers le Québec. Le parti présentait une excellente candidate, madame Rosa Pires qui, à mon avis, a dominé les deux débats. On lui doit notamment cette fort belle phrase que j’ai d’ailleurs reprise dans un billet antérieur : «le PQ n’est pas propriétaire de la nation québécoise». QS est en hausse constante depuis son arrivée sur la scène politique verdunoise : 4,8% en 2007, 5.2% en 2008, 7,3% en 2012 et 9,6% le 7 avril 2014. Cela fait, avec toutes les réserves qui s’imposent, 100% en moins de 7 ans!
La politique étant un sport extrême ainsi que se plaisait à le rappeler Robert Bourassa, je termine avec quelques autres statistiques en vrac :
Lucien Caron obtint sa plus grosse majorité (67,25%) en 1973, Henri-François Gautrin (54,6%) en 1994. Le même H-F Gautrin connut sa plus courte victoire en 2012 (35,4%), alors que «mon oncle Lucien» la connut en 1976 avec 44,1% (peu de surprise là, compte tenu de la victoire historique de René Lévesque).
En 1970, le candidat péquiste Jean-Paul Ross obtint 23,6% des suffrages à la première sortie du PQ. La même année, c’est l’ancien maire Albert Gariépy qui représentait l’Union nationale. Il obtint 10,5% des voix.
Enfin, à l’occasion de la première élection tenue dans la nouvelle circonscription de Verdun en 1966, le libéral Claude Wagner démolit ses adversaires avec 66,3% des votes. L’Unioniste André Fabien, proche de Daniel Johnson père, arriva bon deuxième avec 28,5%. Le Rassemblement pour l’Indépendance du Québec (RIN) y présentait nul autre que le Chevalier de l’Indépendance, le fougueux Reggie Chartrand qui obtint 4.1% des suffrages.
Sur ce, bon congé pascal à tous.